Recette du bon bouchon (recette simplifiée…)

par Walter Gilpin, Domaine de la Vivonne2000

– Planter un chêne-liège.

– Attendre 30 ans.

– Enlever l’écorce de l’arbre et la jeter. C’est l’écorce-mère.

– Attendre 15 ans.

– Enlever l’écorce et la mettre à sécher. C’est la première récolte
d’écorce-fille.

– Attendre 2 ans.

– Quand l’écorce est sèche, la couper en lanières parallèles dont la largeur correspondra à peut-près à la longueur du bouchon. (vous suivez?)

– Depuis l’avènement des “bouteilles “bagues-unicéties”, le diamètre des bouchons est de 24mm. Les longueurs habituelles sont 38mm, 45mm, 49mm, quelquefois 54mm, etc.

– “Tuber” le bouchon dans la lanière de liège.

– Selon les goûts, le laver avec des produits plus ou moins aseptisant, plus ou moins dangereux, et plus ou moins efficaces ( ça ne sert à rien, c’est juste pour le marquer sur les fiches techniques à usage commercial!).

– A ce stade le bouchon est dit “naturel” (laissez tomber les produits…). Il présente sur sa surface plus ou moins de petits trous (quelquefois, des crevasses!) qui vont permettre sa classification dans une catégorie qualitative.

– Si on désire lui donner un aspect lisse, surtout quand il y a beaucoup de trous, l’agiter fortement dans un mélange de colle et de sciure de liège, jusqu’à ce que tous les trous soient bouchés. C’est le bouchon colmaté.

– Qu’il soit naturel ou colmaté, le tremper dans un bain de paraffine ou de silicone. La paraffine est intéressante car elle a une bonne durée dans le temps (au moins 20 ans, après il faut remplacer le bouchon de toute façon). Par contre, pour les vins à boire jeune, le bouchon risque d’être difficile à enlever. Il n’en faudra pas plus pour être boycotté par certains garçons de restaurants “fatigués”, qui préfèrent vendre des bouteilles faciles à ouvrir. Le bouchon enrobé de silicone est plus facile à enlever.

– Adhérer à la Charte des bouchonniers si on veut bien vendre son bouchon. Pour le vigneron, ce n’est pas un indice de qualité, mais surtout l’assurance que tout le monde parle le même langage, surtout en terme de dimension et de classification du bouchon. Certains bouchonniers parlent encore de “lignes” au lieu de mm. (ne me demandez pas combien une ligne fait de mm, j’ai oublié, et je ne veux surtout pas m’en rappeler!). Même chose pour la classification, où certains termes exotiques comme Extra, Extra plus, Premier Choix, ou “Premier Choix Retrié ont heureusement disparu, au profit du classement de la Charte, qui va de 0 à 7. 0 est la meilleure
qualité. ( Quand au bouchon de qualité 7, un sous-marin passe à travers! Il faut le voir pour le croire…).

– Bâtir son argumentaire pour vendre son bouchon. En effet, tout au long de la chaîne que je viens de décrire, qualité et quantité s’opposent constamment:
1 – L’écorce-fille. Le bouchon étant tubé latéralement, on peut observer sur son disque un certain nombre de stries parallèles qui correspondent à l’âge de l’écorce. Ceci est surtout observable sur des bouchons non encore utilisé, mais quelquefois aussi, visible sur le disque non en contact avec le vin, si le bouchon n’a pas été trop déformé par la compression de la boucheuse. Bref, on s’aperçoit que les 15 ans ne sont jamais respectés. Bien content de trouver 12 stries bien serrées (les stries serrées sont le signe que l’arbre n’a pas subi d’apport massif en engrais, et que l’écorce évolue lentement. La plupart du temps, il n’y a que 6 ou 7 stries bien larges!
Économiquement, il est plus intéressant de faire une récolte tous les 6 ans, que tous les 12 ou 15 ans. L’inconvénient technique est que les stries larges affectent la résilience du liège, c’est-à-dire sa capacité à reprendre sa forme (on dit son “nerf”), après avoir été comprimé (et comment!) par la boucheuse.
2 – Le séchage. Dure-t-il vraiment 2 ans ? Les écorces sont-elles
entreposées dans des hangars fermées, ou bien laissées exposées dehors, à la pluie, au froid, au chaud, etc. ? (si, si, je vous assure, ça existe encore). C’est sous ces intempéries que risque de se développer l’affreuse maladie, dite de la tâche jaune et responsable du “goût de bouchon”.
Certains efforts financiers permettent donc de limiter les dégâts, mais font monter le prix du bouchon.
3 – Le colmatage. Cette pratique permet quelquefois de grimper d’une
catégorie qualitative à une autre. Le vigneron qui achète des bouchons
colmatés est un irresponsable car il n’a plus le contrôle de ses
approvisionnements (Allez-y! Frappez-moi, mais je ne retire rien..hé hé):
Tous les trous sont bouchés, le bouchon à un aspect plutôt engageant, mais qu’en est-il réellement de sa qualité ?

En conclusion, je dirais qu’il ne faut pas croire que longueur est synonyme
de qualité. Il vaut mieux un 45×24 naturel paraffiné, de qualité 0, qu’un 54×24 colmaté siliconé de qualité 5.
Par ailleurs, les prix sont très variables, et peuvent facilement aller de 1 à 5, sans que la différence à l’oeil nu soit évidente. Par exemple, un 45×24 qualité 0 coûte en moyenne 1.50 F, et un 38×24 qualité 3 coûte 0.40 F. Ces prix sont des moyennes qui dépendent également de tous les facteurs de fabrication.

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About Mike Tommasi

~~~EN I live in Provence, around Bandol AOC, on the shores of the Mediterranean. My profession, which has nothing to do with wine or food, allows me to travel a lot, plus I am a volunteer organizer of Slow Food, so I organize food and wine events and I am lucky to have plenty of occasions to sample all the wonderful terroirs of the world. I created this blog as a community outlet for stories and information about wine and food, with a lot of help from my friends. ~~~FR Je vis sur le littoral de Provence, atour de l'AOC Bandol. Ma profession, qui n'a rien àvoir avec le vin ou l'alimentation, m'oblige à voyager loin et souvent ; en plus, en tant que bénévole de l'association Slow Food. Ainsi, j'organise pas mal d'événements oeno-culinaires, et j'ai la fortune d'avoir pas mal d'occasions pour découvrir toutes les bonnes choses issues des terroirs du monde entier. J'ai créé ce blog comme véhicule pour un groupe d'amis collaborateurs qui aiment raconter des histoires sur le vin et le bon manger. ~~~IT Abito in Provenza mediterranea, vicino alla AOC Bandol. La mia professione, che non ha nulla a che vedere con il vino o il mangiare, mi permette di viaggiare spesso e dappertutto, e in più sono un organizzatore dell'associazione Slow Food, quindi organizzo eventi eno-gastronomici e ho molte occasioni per scoprire gli eccellenti prodotti dei numerosi terroir del mondo. Ho creato questo blog come veicolo per una comunità di amici che amano scrivere sul vino e sul buon mangiare.

1 thought on “Recette du bon bouchon (recette simplifiée…)

  1. DELBECQ André

    Actuellement, on trouve de plus en plus de vins qui ont un goût de bouchon : je pense qu’à terme, si on ne trouve plus de bons bouchons, il faudra recourir au synthétique qui, bien fait, pourrait avoir des qualités identiques à celles du bouchon pour ce qui est des échanges, sans en avoir le goût désagréable. J’en ai vu un très convenable sur une bouteille de vin italien.

    André Delbecq

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